Svetlana Khlystov — Давай !

T’as toujours été la plus belle. Maman te l’a toujours rappelée, les garçons aussi. On t’a toujours donné tout ce qu’il fallait pour être la plus parfaite des petites filles. Le joyau de la famille Khlystov. Habituée à mener une vie digne de la plus grande des reines, t’as jamais vraiment été l’enfant sage au bac à sable. Les problèmes étaient souvent rapidement réglés grâce aux 3 grands frères. Personne ne pouvait te faire de mal : tu avais toujours un mur pour te protéger, un mur derrière lequel te cacher lorsque tu allais trop loin.

Arkady était souvent le premier à débarquer pour effrayer les plus téméraires. Il n’y avait pas trop d’écart entre vous, mais toujours plus grand et par conséquent plus impressionnant que Nikita avec qui tu faisais les 400 coups….
Pas forcément bonne à l’école, mais on te l’excusait, car tu étais belle. Maman te le disait tout le temps. Si tu veux quelque chose ma fille, alors bats-toi pour l’avoir. C’est une phrase que t’as toujours en tête, parce que c’est ce qu’elle te disait tout le temps. Tu voulais les bonbons d’une petite. Tu les prenais. Tu voulais un stylo. Tu le volais. Tu voulais une robe. Papa l’achetait. Au fur et à mesure, sans même te rendre compte, t’avais développé cette cleptomanie qui te fait défaut aujourd’hui. T’as besoin d’avoir certaines choses, aussi inutiles en soient certaines.

Quand t’as commencé à grandir et que Arkady s’est fait pincer, c’est auprès de Dimka que tu t’es réfugiée. En grandissant, la différence d’âge ne te faisait plus trop peur. Il était grand et fort, encore plus intimidant qu’avant. Quand l’adolescence commençait à se pointer, en l’absence de ton autre aîné, c’est lui qui te servait de bouclier.

Et ton monde s’est effondré quand, en 2015, maman est partie. Tout a volé en éclat. Ta vie, tes rêves, ton père. Sans réellement comprendre, ta crapule de frère (#Nikita) et toi, vous vous retrouvez embarqué en Russie, sans Arkady et Dimka. Tes frères, c’est une partie de toi, ça l’a toujours été, et ça, jamais tu ne le pardonneras à ton père.
S’il traîne dans du sale, alors toi aussi tu deviendras sale. C’est là ta déchéance, petite princesse, quand tu décide de faire de tes rêve un enfer sur terre. T’as aucune nouvelle des garçons, ton moral est au plus bas. Qui pourras te protéger, ici, de Papa ?

Tu fais trop de bêtises. Papa ne te supportes plus, en plus, tu ressembles d’autant plus à ta mère en grandissant, si bien que pour te contrôler, t’es en permanence surveillé par des gars. Parfois Vladimir, Nikola, Sergei, ou un autre. T’es la petite peste insupportable de la famille Khlystov, la petite garce qui joue avec le feu, qui manque de se brûler, mais dont les gorilles ont trop peur pour céder. Et puis une fois tu vas trop loin. Beaucoup trop loin, et l’un de tes gardes rapprochés se dit que ce n’est pas grave, que personne ne saura la vérité.

C’est là qu’il est apparu. Tu ne l’as pas reconnu, t’avais entendu dire qu’il était revenu, mais comme t’étais un peu séquestré, t’y croyais plus. Lyov. C’était des rumeurs, t’as entendu papa en parler, mais jusque-là, rien de concret. L’hématome sur ta joue ne lui a pas plu, tout comme ces larmes sur tes joues.

Sergei a disparu.

Dans le néant.

Si Dimka est de retour, alors où est Arkady ? Personne ne dit rien, tout le monde se tait. Tu décides de rentrer avec Nikita pour rejoindre tes deux frères à Galway, parce que même si t’étais sur le sol de tes origines, tu pouvais plus supporter le regard de ton père. Tu supportais plus l’entendre t’appeler par le nom de ta mère.

Retour au bercail avec quelques cicatrices, t’apprend la vérité. Arkady n'a pas pu quitter l'Irlande avec le suivi par agent de probation. La colère gronde et Dimka doit rendre des comptes. T’es plus la petite fille qu’ils ont connue. T’en a vu des choses avec Papa et ta crapule. T’as envie de jouer avec le feu, encore un peu, t’aimes cette adrénaline qui te fait te sentir en vie…

Mais tu voudrais les protéger.

Échec cuisant, sans nul doute. Les soucis se sont accumulés. Les problèmes à Galway se sont accumulés, si bien que tu t'es perdu. Nikita ne doit pas sombrer. Le plus gros échec selon toi, dans t'entends parler de leurs éternelles disputes avec Dimka.
Arkady doit rester dans les cordes, jamais tu ne te pardonneras qu’il y retourne, dans cette cellule bien trop petite. Tu veux pouvoir retourner en Russie avec lui cette fois. Il est parti, sans vous. Sans toi. Il est retourné à la mère patrie, sans que tu puisses être en capacité de le rejoindre. Ark va revenir, mais quand ?
Dimka… C’est encore compliqué aujourd’hui, t’es encore un peu rancunière alors tu lui en fait voir des vertes et des pas mures. T’aimerais un jour pouvoir le croiser pour de bon, une nouvelle fois, ce Lyov. Tu voudrais le remercier de t’avoir sauvée…. Ses disputes incessantes avec Nikita te laissent perplexe. Tes retrouvailles avec Lyov te tiraillent. Faut-il en vouloir à Dimka de ne pas savoir garder le contrôle ? Faut-il en vouloir à Lyov d'agir de manière excessive au point de faire du mal à la famille ? Tu ne sais plus vraiment si tu veux le voir ou pas,... Et tu sais que si tu le défends, tu perdras Nikita. Alors, quel côté dois-tu choisir ? Qui est bon, qui est mauvais ?

Alors, comme une pyromane, tu joues avec le feu, sans prendre garde au moment ou tu brûleras ta petite robe de princesse. Elle a brûlé ta robe, depuis bien longtemps. Tu voulais pas te l'avouer... Mais rien n'a jamais tourné rond dans ta tête au final. Toi, Svetlana Khlystov, tu continues de n'en faire qu'à ta tête. Tu fuis ton quotidien, tu fuis tes responsabilités en sombrant discrètement dans des substances qui te font oublier ces tracas qui t'obsèdent. Dans le dos de ton aîné, tu fricotes avec les italiens, ou du moins avec l'un d'entre eux qui te permet de te faire de l'argent avec ta manie à tout chiper. Un revendeur. Tu fréquentes aussi les les irlandais, qui te fournissent cette poudre blanche que tu t'enfiles. Cela fait longtemps que tu n'as pas volé l'argent dans la caisse de Dimka, depuis que tu fais ton propre business à l'abri des regards.

Fuir le quotidien. Fuir cette vie. Fuir ces secrets. Fuir ces mensonges... Fuir tout ce qui peut rappeler ton paternel. Tout oublier.

Encore faut-il y croire.