Brendan McMurphy - Can love give a second chance?

Je me nomme Brendan et je suis le second d'une fratrie de quatre enfants, trois garçons et une fille.
Ma famille est très appréciée à Galway, mon père Alastair McMurphy est l'ancien chef de la police, mon frère aîné, Alastair Jr mais que chez nous tout le monde appelle Al, sauf notre paternel qui s'évertue à l'appeler Junior au grand dam de ce dernier, est devenu par la suite le nouveau chef en reprenant le flambeau.

Mais pour l'instant, intéressons nous à mon enfance.

Petit, je m'entendais très bien avec mes frères et ma sœur, nos parents n'ont jamais fait de différence entre nous et nous ont inculqué les bonnes valeurs, tout se passait très bien à la maison. Bien sûr il y avait toujours quelques petites querelles et jalousies mais qui n'a jamais connu cela avec ses frères et soeur ? Tout rentrait dans l'ordre rapidement car Papa et Maman avait une politique d'éducation radicale : si les disputes ne se réglaient pas dans la minute, tout le monde était puni, innocent ou pas, je peux vous assurer que nous avons bien rapidement comprit quelle ligne de conduite nous devions tenir et le calme revenait instantanément. J'étais studieux, j'aimais l'école mais j'attendais surtout la récréation pour aller jouer au football avec mes copains, il n'y avait rien qui pouvait me rendre plus heureux que d'aller taper dans un ballon, qu'il pleuve, vente ou neige. Après les cours j'allais tous les après-midi m'entraîner avec mon club, le dimanche c'était jour de match, nous étions assez bons mais quand nous perdions l'une des rencontres, c'était la fin du monde pour moi et de plus j'étais assez mauvais perdant. J'ai intégré une section sport étude à partir de mes 14 ans, mon père aurait préféré que je choisisse une autre voie telle que la police pour faire perdurer la tradition familiale  mais ma mère réussit à le convaincre que j'avais le football dans le sang et que jamais je ne serais heureux si je ne vivais pas mon rêve en devenant professionnel, il s'inclina au terme d'âpres négociations face au pouvoir matriarcal. J'ai goûté à une peu plus de liberté lors de cette période car je ne rentrais chez moi que le weekend et parfois même uniquement pour les vacances scolaires, faisant parfois le mur le soir pour aller boire des bières  et fumer des clopes au pub avec mes potes, je me suis d'ailleurs durement sermonner par mon père car l'un de ses hommes m'avait vu fumer, j'ai promis devant Dieu de ne plus recommencer, je ne suivis jamais cette promesse étant profondément athé. Lors de l'une de ces virées j'ai rencontré Jenna, j'avais 16 ans, on ne s'est plus quittés, je suis tombé amoureux d'elle sans même m'en rendre compte. Ses mains, sa voix, ses longs cheveux, tout d'elle me séduisait. J'ai quitté le sport étude pour signer avec un club du Pays de Galles, Jenna m'a suivi, on s'est installé dans un petit appartement, je voulais l'épouser et elle m'avait dit oui, mais par dessus tout nous voulions un bébé, une part de chacun qui nous aurait uni pour toujours bien plus qu'une signature sur un registre. Nous avions tous les deux 21 ans et cela faisait deux ans que nous essayions, sans succès. Jenna a vu un gynécologue qui lui a prescrit des examens pour vérifier que tout allait bien qui n'ont rien révélé d'anormal, j'ai fait les miens de mon côté et là, le verdict est tombé «azoospermie» terme barbare qui voulait dire que j'étais stérile avec une totale absence de spermatozoïdes, même pas un seul. J'étais choqué, complètement abasourdi par cette nouvelle, incapable de penser correctement. D'abord ce fut l'incompréhension, je me demandait comment je ne pouvais pas avoir de spermatozoïdes car pour moi, à l'époque, le sperme c'était forcément le liquide dans lequel les spermatozoïdes évoluaient et donc je devais en avoir, c'était aussi simple que cela. Nous sommes allés voir un médecin, puis un autre, et encore un autre, tous m'expliquaient dans leur jargon médical des choses que je n'arrivais pas à admettre et pourtant au bout de deux semaines j'ai bien dû me rendre à l'évidence. Un silence s'était instauré entre Jenna et moi, des regards fuyants, des mots que l'on ne posait pas sur mes maux, aucun de nous deux ne parlait de notre problème, cela a duré des semaines entières. Enfin...notre problème...c'étair ce que je croyais... soir j'arrivais enfin à parler à ma compagne, j'étais malheureux, je me sentais coupable et vraiment anéanti, je lui parlais de nos problèmes de conception, que j'avais pensé à cette solution que l'un des médecins nous avait indiqué à savoir avoir recours à un donneur. Je m'étais livré, j'avais rendu les armes et m'étais mis à nu devant elle, j'admettais que j'avais besoin d'elle pour faire de nous deux des parents car je l'aimais et j'aurais tout accepté pour elle. Pour seule réponse j’eus face à moi un masque froid, elle me répondit que ce n'était pas son problème mais uniquement mon problème, seulement le miens et qu'elle ne voulait pas avoir recours à ce procédé. Je ne la comprenais pas, la conversation a dégénéré, elle m'a traité de sous homme, m'a sorti des horreurs, le lendemain elle rentrait à Galway. J'ai fait une saisonsupplémentaire avec mon club puis je suis rentré à Galway moi aussi. Je l'ai recroisée, elle était en couple avec un gars que je connaissais un peu de vue, elle semblait filer le parfait amour. Moi j'étais seul, je me plongeais dans mon boulot, sur le terrain j'étais devenu un véritable tueur, mon équipe gagnait mais moi j'allais mal, je n'avais plus ce frisson qui me parcourait quand le coup de sifflet final retentissait et qui indiquait que nous étions vainqueurs. Non, moi je faisais les choses sans être vraiment là, je ne faisais que vivre ma vie comme si j'en étais le spectateur, une part de moi était morte deux ans plus tôt. Je n'étais plus à mes yeux l'homme que j'avais voulu être, je ne me confiais qu'à Siobhan, ma Shiv, ma meilleure amie et à Cali, ma petite sœur qui savait si bien m'écouter, je n'avais rien dit au reste de la famille, mes frères, je ne suis pas certain qu'ils auraient compris à quel point ça m'atteignait et ma mère, ma pauvre maman ça l'aurait tellement fait pleurer. Je me perdais dans l'alcool, pas jusqu'à me rendre complètement ivre au point de perdre totalement pied mais assez pour voir la vie d'un autre regard, celui d'un mec qui n'en avait plus rien à foutre d'être pire qu'un eunuque car eux au moins les eunuques on leur avait volé la chance d'avoir un jour des gosses en les castrant, moi c'était bien pire, c'était la nature qui m'avait fait ainsi, c'était vraiment pathétique. Shiv s'inquiétait de plus en plus de me voir me perdre ainsi. Je me vautrais dans tous les excès, de filles en filles, j'avais même une phrase d'approche qui les faisait rire car elle croyaient que je n'étais pas sérieux « Avec moi ma belle pas besoin de pilule tu fais des économies », elle riaient comme des gourdes en m'entendant, pensant que c'étaient les paroles d'un mec qui avait vraiment un peu trop forcé sur la bière. Shiv est venu me voir un soir où j'étais assez sobre pour pouvoir écouter ce qu'elle avait à me dire et ce qu'elle me dit faillit me faire tomber de ma chaise. Elle avait un plan qui selon elle serait infaillible, je ne la comprenais pas vraiment, je lui demandais «Mais quel plan, pour quoi faire ? » elle me regarda droit dans les yeux et me lança «Pour qu'on ait un bébé toi et moi ». J'ouvrais grand la bouche sans pouvoir parler durant quelques secondes , ne comprenant pas où elle voulait en venir puis ma surprise passée, j'arrivais enfin à articuler les mots qui passaient en boucle dans mon esprit «Je te rappelle que je suis stérile Shiv, je tire à blanc ma belle, je ne risque pas de te mettre enceinte tu sais ». Je la regardais avec une totale incompréhension...d'ailleurs...pourquoi m'avait elle choisit moi pour lui faire un gosse ? On était des amis et nous n'avions  jamais couché ensemble, et pas même échangé un baiser. Elle leva les yeux au ciel et soupira « Mais t'es vraiment idiot ou quoi ? On va adopter toi et moi, mais avant ça mon grand tu vas me demander en mariage devant tous nos proches réunis, tu vas faire de moi ta femme et ensuite nous allons remplir un dossier d'adoption » J'ouvrais alors de grands yeux puis éclatais de rire, je lui demandais si c'était une blague. Elle me certifia que non et là, j'ai vu dans son regard déterminé qu'elle était sérieuse, j'ai commencé à y réfléchir moi aussi un peu plus sérieusement. Nous avons parlé toute la nuit et le lendemain, nous avons commencé à mettre notre plan en route, sortant ensemble dans des endroits publics, nous embrassant devant les gens que nous connaissions, cela me faisait une drôle de sensation mais pour que notre machination fonctionne, il fallait que tout le monde soit convaincu de la véracité de notre amour. Je revoyais un soir Jenna, elle était seule et moi j'étais au comptoir du Jimmy's où tous les jeunes de Galway avaient l'habitude de se retrouver. Elle est venue me voir, on a parlé quelques minutes, je lui ai apprit que je me mariais avec Shiv, elle accusa le coup, elle me dit qu'elle m'aimait encore. Bizarrement, cela ne me fit ni chaud ni froid, tout sentiment romantique pour elle m'ayant quitté. Je retournais vers mes amis et ma fiancée après avoir récupéré ma commande. Je ne repensais pas à cet incident et profitait de ces moments d'insouciance. C'était très étrange, parfois mon imaginaire se prenait au jeu mais je n'allais jamais au delà des règles que nous nous étions fixées, une relation platonique que même notre nuit de noce n'a fait transgresser. Nous nous sommes marié assez rapidement, au bout de 6 mois, ma mère trouvait cela trop rapide mais tout le monde lui dit que nous étions très amoureux et que nous ne voulions pas attendre pour nous unir. Un an plus tard, en 2001, nous avons commencé les démarches pour l'adoption en déposant un dossier auprès des services de l'enfance. La vie avec Shiv était douce et bien que nous n'ayons aucun sentiment d'amour l'un pour l'autre elle était tout de même remplie de tendresse, j'aimais être marié à elle, elle était vraiment la femme dont j'aurais rêvé pour construire un foyer, d'ailleurs, c'était ce que nous nous faisions. L'heureuse nouvelle arrivait un beau jour de 2002, à peine un an après le début de la procédure, c'était vraiment merveilleux. Une belle petite fille était née en Ukraine et nous avions été choisit pour devenir ses parents, Shiv et moi étions sur un petit nuage. Nous sommes allés chercher notre petit ange jusque dans son pays natal et je me suis senti père à l'instant où ses petits yeux ont accroché mon regard quand je l'ai pris dans mes bras. Nous sommes tous les trois rentrés chez nous et nous avons avons débuté une nouvelle vie, remplie d'amour et de joie. Shiv était une magnifique maman, tendre, attentionnée, notre petite Emma était notre petit rayon de soleil, je me sentais comme l'homme le plus heureux du monde. Quand notre petite fille a eu 4 ans, en 2006, Shiv et moi avons entamé une procédure de divorce à l'amiable, aucun de nous deux ne voulant empêcher l'autre d'avoir une chance de rencontrer l'amour. Ce fut très dur pour Emma, un véritable déchirement pour elle de voir son papa et sa maman qui se séparaient, elle en perdit même le sommeil durant plusieurs nuits. Shiv et moi l'avons élevée conjointement, Emma était une semaine chez moi et une semaine et sa maman, c'était la solution que nous trouvions la plus adaptée pour l'équilibre de notre enfant. Ma mère a vraiment été contrarié de notre divorce, elle aimait vraiment Shiv comme sa fille et elle m'en a d'ailleurs voulu, étant persuadée que tout était de ma faute, je la laissais dire, sachant très bien que tout cela était faux, cela ne m'atteignait pas. Quelques mois après avoir retrouvé mon célibat, j'étais en ville quand j'ai rencontré Jenna dans une boutique, décidément la vie voulait qu'elle soit souvent dans la mienne. Je ne sais trop pourquoi j'ai accepté sa proposition d'aller boire un café, nous avons longuement parlé, elle avait mûrit, elle n'était plus la jeune femme un peu prétentieuse avec lequel j'avais eu une relation. Nous nous sommes revus plusieurs fois, nous avons commencé à sortir ensemble, les mauvais moments du  passé étaient oubliés. Mon ex redevint ma petite amie et elle vint s'installer à la maison. A ce moment là mes relations avec Emma devinrent assez houleuses car elle ne voulait pas de Jenna à la maison, elle la détestait. Tout mon entourage est d'ailleurs de son avis, mes parents sont d'ailleurs persuadés qu'elle est la cause de mon divorce, elle n'est vraiment pas en odeur de sainteté dans le clan McMurphy. Les années ont passé,j'ai mis fin à ma carrière de footballeur et suis devenu entraînneur de l'équipe de Galway,  Emma a à présent 17 ans, c'est une magnifique jeune fille, intelligente, douée, mon rayon de soleil, nous sommes très proches elle et moi. Elle est l'amour de ma vie, le seul et l'unique, elle est celle que j'aimerais jusqu'à la fin de mes jours, cet amour là, aucun amour romantique ne pourra le surpasser. Je suis tellement fier d'être son père, que la vie m'ait fait ce cadeau, que j'ai deux tatouages qui lui sont dédiés. Jenna trouve d'ailleurs mon amour pour ma fille excessif, j'ai depuis quelques semaines l'un de ces tatoos qui représente un claddagh avec le prénom d'Emma sur mon cœur, ma petite amie est choquée par cela. Une dispute a éclaté, comme il y a 20 ans, toujours aussi violente, elle m'a dit que mon amour pour ma fille était malsain, qu'elle ne comprenait pas, je lui ai rétorqué qu'elle ne pourrait jamais comprendre car elle ne savait pas ce que c'était d'être parent. A ce moment là, elle m'a dit des mots que je ne pensais pas possibles venir de cette personne que j'avais réappris à aimer «Ouais, vu que tu n'es pas capable de me faire un gamin, je ne risque pas de savoir ce que c'est ». Je suis sorti de la maison, sans même trouver quelque chose à lui répondre. Je n'en revenais pas, moi qui croyais que ses ressentiments envers ma stérilité étaient du passé et que nous allions enfin pouvoir construire un avenir ensemble, elle me décevait à nouveau. Ce soir là je ne suis pas rentré, comme de nombreux autres soirs par la suite, passant très souvent mes nuits dans d'autres draps que les miens. A tout ceci s'ajoute un autre problème : Emma a qui Shiv et moi n'avons jamais caché qu'elle avait été adoptée, veut retrouver ses origines, savoir qui étaient ses parents et d'où elle vient. Elle a entreprit des démarches administratives, je l'encourage mais mon sourire est faux car intérieurement, je suis tétanisé, j'ai terriblement peur qu'elle m'abandonne, qu'elle nous oublie sa mère et moi, ce n'est certainement pas le cas mais je n'arrive pas à m’ôter cette pensée de mon esprit.