Rose V. Hastings

Il était une fois, un joli petit bébé né par un beau jour d'hiver. Une fille, enfant unique mais tellement désirée. Ses parents s'étaient mariés  jeunes mais il leur a fallu près de 20 ans avoir de réussir à avoir un enfant. Pour dire la vérité son père avait même totalement abandonné ce désir et s'était plongé corps et âmes dans son travail. C'était un producteur reconnu dans le monde de la télévision anglaise. Les meilleurs émissions, les reportages les plus populaires, s'était toujours lui qui les dénichaient et les produisaient. Rose a grandi dans un univers très confortable. Grande maison de style victorienne à Westminster, école privée, baby sitter, cours de piano, équitation, danse classique, non vraiment cette petite ne manquait de rien.

N'allez pas pour autant croire que cette petite était le type pourrie gâtée, enfant roi, loin de là. Sa mère, une psychiatre pour enfant, lui rappelait très souvent à quel point elle était une petite fille chanceuse. Chanceuse d'avoir des parents aimants, d'avoir tout ce dont elle rêvait, des amies, de pouvoir faire ce qu'il lui plaisait. Rose était une enfant joyeuse, souriante et très enjouée. Elle avait le contact avec les autres facile et savait s'entourer. On pouvait dire qu'elle faisait partie des enfants populaires, plutôt leader. Elle aimait l'école mais surtout pour pouvoir discuter avec ses copines!

Malheureusement, peu avant ses 13 ans sa mère mourut, très rapidement d'un cancer du sein laissant Rose complètement dévasté. Elle s'entendait bien avec son père mais il travaillait tellement qu'elle avait depuis longtemps l'impression de ne pas le connaître. Sa mère finalement c'était tout son monde. Quand en plus on débute l'adolescence...Ce ne fut pas une période facile pour Rose. Son comportement oscillait entre la profonde dépression et la rébellion. Personne ne savait plus comment la prendre. Elle pouvait passer de l'abattement le plus total à la colère la plus violente. Ne pas quitter son lit pendant des jours puis faire la fête à finir ivre morte avec des inconnus. Elle même parfois, dans certains moments de lucidité, se demandait comment elle allait se sortir de tout ça. C'était comme nager de toutes ses forces pour remonter à la surface et que quelqu'un vous enfoncez la tête sous l'eau à chaque fois que vous essayiez de reprendre une grande bouffée d'air. Elle a fini par accepter de voir une psychiatre. L'acceptation a été très longue, elle avait tellement l'impression de trahir sa mère en allant parler à quelqu'un d'autre. La relation avec son père n'a jamais réussi à devenir aussi forte que celle qu'elle avait eu avec sa mère. Rose avait tout simplement l'impression qu'il ne la connaissait pas. Mais petit à petit elle a réussi à reprendre le courant de sa vie. Quand elle a eu son diplôme elle a choisi de partir étudier aux Etats Unis, à l'université de New York. Elle a choisi d'étudier la psychologie, comme sa mère. Elle ne voyait d'ailleurs pas ce qu'elle aurait pu faire d'autre.

Les années passèrent et Rose devint une jeune femme épanouie. Elle est restée à New York une fois son diplôme obtenu pendant quelques années, travaillant comme psychologue à l'hôpital, auprès de personnage âgées en maison de retraite et même auprès d'adolescents en difficultés. Finalement elle eut l'opportunité de revenir à Londres pour travailler dans un foyer d'accueil de jeunes enfants. C'était une expérience qu'elle n'avait encore jamais faite et elle voulait tout essayer avant de décider dans quel domaine particulier se poser.

Elle avait tout juste 25 ans quand elle rencontra James. Il était plus âgé qu'elle, professeur à l'université, brillant, charismatique. Rose nageait dans le bonheur auprès de lui. Ou plutôt et avec le recul, elle pensait nager dans le bonheur. Il était serviable, attentionné, à l'écoute de ses besoins, jaloux certes mais c'est mignon non? Et son père l'adorait. Elle était heureuse d'avoir renoué avec lui. Elle l'avait peu vu pendant toutes ses années à New York et leur relation se limitait pour ainsi dire aux virements qu'il lui faisait tous les mois, et à des conversations autour de l'argent dont elle avait besoin. Elle habitait un très bel appartement avec James, elle avait baisser ses heures de travail à mi temps afin d'avoir plus de temps libre avec lui. Ils étaient un couple très fusionnel. Rose avait du mal à trouver du temps pour ses amis et James n'aimait pas qu'elle sorte sans lui. Il n'aimait d'ailleurs pas beaucoup non plus ses amis. Mais Rose n'y voyait rien de mal. Ils étaient amoureux.  Ils se sont mariés il y a trois ans, juste avant de partir pour l'Irlande. James s'était vu offrir un travail très intéressant à l'université de Galway. Rose n'était pas enchanté à l'idée de quitter Londres, son travail, ses amis et son père avec qui les liens avaient été renoués, mais comme James lui avait fait remarqué il ne pouvait pas refuser cette offre.

Elle s'était dit que s'était un de ces nouveaux départs comme elle en avait déjà vécu plusieurs. Elle savait qu'elle pourrait trouver du travail ou pourquoi ouvrir son cabinet. Finalement en arrivant elle n'avait pas trouvé immédiatement un travail qui l'intéressait et James lui avait déniché un poste d'archiviste à la bibliothèque de l'université. C'était loin de l'enchanter mais ils pourraient se voir souvent, manger ensemble le midi, et puis c'était temporaire...Finalement le temporaire durait depuis trois ans. Rose détestait son travail. Enfermée toute la journée, avec quelques collègues, uniquement des femmes avec qui elle ne partageait rien. James était devenu au fil du temps de plus en plus présent. Il passait à l'improviste aux archives et était furieux si elle n'était pas là. il régentait son emploi du temps et faisait absolument tout avec elle. Elle se sentait complètement étouffée mais se sentait incapable de se sortir de cette situation. Elle lui avait trouvé tellement d'excuses à chaque nouveau comportement abusif qu'elle savait bien que c'était elle qui s'était mise dans cette situation. Maintenant il lui faisait même peur. Il fallait qu'elle soit joli mais pas trop, drôle mais pas hilarante, intelligente mais pas plus que lui. Au retour d'une soirée avec ses collègues professeurs il avait été tellement en colère qu'elle ait parlé de son diplôme, de sa vie à New York, lui reprochant de vouloir se mettre en avant, d'aguicher les hommes, qu'elle avait bien cru qu'il allait la frapper. Son mariage avait basculé dans la terreur. Bien sûr, il pouvait se montrer incroyablement gentil et romantique. Mais maintenant même ses attentions ont un côté effrayant. Rose a vraiment peur de lui.

Depuis quelques semaines elle a pris l'habitude de sortir le soir une fois qu'il est endormi. Le tâche ayant été facilité par le fait qu'il avait commencé à prendre des somnifères à la suite de quelques problèmes professionnels. Elle a commencé par juste sortir au pied de leur immeuble. Juste quelques minutes, respirer l'air frais. Finalement elle a commencé à marcher un petit peu, à déambuler sans trop savoir où aller. Mais ces moments seule lui font tellement de bien. Elle ne croise pas grand monde, elle découvre la ville, croise parfois quelques fêtards. Et puis il y a cet homme. Cela fait quelques fois qu'elle le croise. Ils ne se sont pas parlé ils ont juste échangé quelques regards, un ou deux sourires. Bien sûr il est charmant mais Rose ne sait pas ce que cet homme a de si particulier qui fait qu'elle a envie de le revoir. Le soir elle se surprend à repasser dans les rues où elle l'a croisé dans l'espoir de le voir de nouveau. Elle n'imagine absolument pas lui parler, elle a bien trop peur des réactions de James s'il l'apprenait. Mais c'est plus fort qu'elle, elle cherche son visage parmi les autres.