Leti • Express yourself and don't mind about what other people say cause in the end ... it's you not them !

A ce que l’on raconte, ma mère était une célèbre mannequin allemande. Elizabeta Hanover. Papa me dit souvent que je lui ressemble énormément, mais étant donné que je n’ai que très et trop peu de souvenirs d’elle, je ne sais pas s’il dit ça pour me faire plaisir ou pas. Je ne sais pas s’il le pense ou pas. Je n’ai jamais réellement compris quelle a été leur relation à tous les deux. J’étais bien trop jeune pour comprendre. J’étais bien trop jeune pour comprendre ceux qui lançaient des ignominies à mon père quand nous remontions le chemin du cimetière après la mise en terre de maman. Ceux qui disaient que papa était heureux qu’elle ait disparu. Je n’ai jamais vu papa pleurer, jamais. Mais je n’ai jamais soupçonné qu’il soit non plus heureux de sa mort, pire encore … qu’il ait quelque chose à voir dedans. Moi j’étais plutôt persuadé que c’est une sorte de malédiction. Il faut dire que Mama Napoli, la femme qui aidait maman à m’élever, était une femme très superstitieuse et qu’elle m’a refilé cette caractéristique. Elle était persuadée que maman avait attiré le mauvais œil et que c’est pour ça qu’elle avait fini par trouver la mort. Étant donné que je vais passer tout mon temps avec elle à cette époque, c’est tout naturellement que j’y ai cru moi aussi.

Silvio arrive à la maison quand j’ai huit ans. Déjà je suis habituée à un train de vie de princesse, et j’en joue. Pourquoi ne pas en profiter si c’est mis à ma disposition. J’en ai profité on peut pas dire l’inverse. Au début, je ne voyais pas forcément d’un très bon œil de devoir partager ma nounou avec quelqu’un. Parce que oui … ma Mama Napoli c’est la mienne. Et j’ai pas vraiment envie de la partager. Et puis surtout je me demandais qui c’était cette espèce de petit avorton qui débarquait tout d’un coup dans notre vie. Aucune idée du haut de mes huit ans que l’on pouvait avoir des problèmes avec ma famille, la mafia. Quand on est dedans et qu’on est aussi jeune que je l’étais … on ne voit pas forcément que quand on n’y est pas … Ce n'est pas aussi simple. Alors imaginer que le père de Silvio l’a “vendu” à Papa pour pouvoir éponger ses dettes … Le gosse avait trois ans quoi … moi je voyais surtout qu’il était celui qui prenait l’attention sur lui.


Mais finalement j’étais content d’avoir un petit camarade avec moi, quelqu’un avec qui faire les 400 coups, c’était une bien grande maison au final pour une enfant seul. Étant donné que papa n’a jamais eu d’autres enfants, officiellement en tout cas. Silvio et moi étions des gamins assez joyeux. Et finalement on s’est plutôt bien entendu. C’était comme une évidence, il était toujours là avec moi. Et j’étais toujours là avec lui … Est-ce que c’est là que l’attirance a commencé entre nous? Aucune idée on était jeune, et puis il faut dire que l’ambiance dans laquelle on a été élevés n’a pas favorisé les rapprochements amoureux.

J’ai rapidement compris ce qu’étaient les affaires de papa. La mafia. Le trafic d'armes notamment.
Et finalement ça m’a pas étonné je pense que c’est l’atmosphère, le contexte dans lequel j’ai été élevé et dans lequel j’ai grandi depuis toujours quand j’étais habitué à ces hommes en costume aussi accueillants que des portes de prison. Et pas seulement parce que les italiens sont chic et souvent bien sapés. Les regards austères, les carrures bien dessinées, les lunettes de soleil sur le nez. Et papa ne m’a jamais rien caché non plus. Il était un parrain de la mafia. Et moi sa fille la prunelle de ses yeux. C’est là que j’ai compris la raison de la présence de Silvio chez nous.


Entre Silvio et moi on n’a jamais rien défini. Ni cherché à définir. Aucune envie de le faire. Et surtout il était bien plus jeune que moi … et mine de rien. Il était entraîné à faire partie de cette mafia que j’embrassais de tout mon être à présent. Papa voulait que je fasse des études. Moi je ne sais pas trop si ça me plaisait ou même si j’en avais envie. Mais je n’ai pas refusé. Après tout cela ne peut qu’être positif et utile. Du moins je pense. J’ai donc quitté ma ville natale et Silvio en pleine ascension pour aller poser mes fesses sur les bancs de la fac.

L’absence de ce cocon protecteur qu’a toujours été l’emprise de papa m’a donné des ailes. Je me suis sentie revivre. Ou peut-être tout simplement … vivre. Là ou je n’avais toujours connu que la famille (autant en termes de mafia ou de famille réelle) j’avais des amis. Des personnes qui ignoraient que mon père était un parrain de la mafia. C’est là que j’ai connu mon premier amour aussi. Et ma première déception sentimentale quand je l’ai retrouvé dans les bras d’une de nos profs de fac. La pomme ne tombant pas trop loin de l'arbre, je suis celle qui a révélé tout de l’affaire aux autorités et à la faculté. Sans vergogne. Je crois que c’est la première réelle fois où papa a été fier de moi. J’étais sa digne fille.

Études de comptable j’étais responsable des finances de cette boîte de nuit. Si au départ c’était pour me divertir à présent je ressentais une réelle liberté et un besoin de danser. Oui vous pouvez appeler ça cliché mais … je suis devenue stripteaseuse. Juste parce que je le pouvais. Et parce que, comme j’ai toujours aimé, cela attirait tout plein de regards sur moi, on ne peut pas dire que c’est désagréable, non ? Alors oui je me suis amusée, j’ai dansé, je me suis déhanchée et j’ai subi des regards salaces sur ma personne. Tant que je pouvais les contrôler, cela ne me posait pas de souci. Parce que je n’étais là que pour danser et dévoiler mon corps, loin, très loin était la possibilité pour eux de poser leurs sales pognes sur mon corps et ses courbes.


Et puis je l’ai vu débarquer un beau jour. Il avait grandi. Et en même temps. Moi aussi. C’était normal que le temps passe ainsi. Pour lui comme pour moi. Mais en un coup d’œil j’ai su qui il était. Comme si je connaissais son âme. Comme si je savais qui il était. Lui par contre ny a vu que du feu. Et c’était assez amusant à constater. A croisé qu’il ne s’imaginait pas que la petite fille avec qui il avait été éduqué avait pu grandir et à présent se montrer dans des tenues affriolantes auprès d’hommes aux desseins bien louches. Mais il savait qui étaient ces hommes. Il ne les connaissait que trop lui était à présent bien placé près de papa. Près des autres de la mafia. Je le savais.

Et il en prend l’occasion. Car je le connais. Avide de pouvoir mais surtout et avant tout. De reconnaissance. Le vieux proprio de fait avoir comme un bleu ! Et c’est à présent lui. Silvio, qui reprend les rênes de la boîte de strip. Son visage quand il me verra débarquer au restaurant le plus populaire de Rome quand il a rendez-vous avec papa restera toujours gravé en ma mémoire. Surtout quand je laisse échapper de mes lippes un « bonjour papa » et que je plante sur sa joue barbue un baiser enfantin. Silvio comprend enfin que je ne suis pas juste Ruby Red mais aussi bel et bien Leti. La Letizia qu’il a connu jadis. Mais qui a bien grandi.
Entre nous le courant est toujours bien passé. Et les années n’ont clairement rien abîmé. Il est beau , grand et il s’affirme. Et puis … je ne le laisse pas insensible, je le sais à sa manière de me regarder avant pendant et après mes shows sur scène. La jalousie que j’arrive à faire naître dans son regard. Rapidement nous succombons. Sans rien promettre du bon temps. Entre vieux amis. Papa n’apprécierait pas de toutes les manières. Silvio n’est pas assez bien. Pas pour sa fille en tout cas.

Papa n’aime pas l’idée que je danse et appuyé par Silvio il me convainc à devenir comptable pour la boîte. Aucun problème. De cette manière je peux passer encore plus de temps avec Silvio. Mais papa n’aime pas non plus l’idée que je ne puisse pas être « utile ». Alors il décide de me trouver l’homme de ma vie. Comme si on pouvait trouver ça au coin de la rue. Et pourtant techniquement c’est là qu'il a trouvé Antonio. Les hôtels Tocci gagnent en réputation et papa aimerait beaucoup pouvoir en profiter. Me voilà donc avec un fiancé dans les pattes. Oh Antonio pourrait plaire à plein de femmes. Je vous l’accorde. Il est intelligent. Riche. Et il a un physique très plaisant à l'œil. Mais je ne l’aime pas. Et il ne m’aime pas non plus. Mais ça, Gianni Gigliotti il s’en fiche. Complètement.

Durant une bonne année, bien que je sois fiancée c’est avec Silvio que je passe mes nuits. À bosser officiellement. De manière charnelle officieusement. Mais face à ma réticence. Le fait que je refuse de décider d’une date de noces ou que je n’organise rien. Que même je ne souhaite pas emménager avec lui ! (Oh non pas question avant le mariage) papa me met la pression. Et mon futur beau père aussi. Les affaires … en 2002 je cède et demande une année pour préparer le mariage. S’ensuit une année de douleur et de cauchemar que Silvio m’a mainte fois proposé de quitter pour nous enfuir tous les deux. Mais je ne pouvais pas faire ça à papa.

Je suis prête. Résignée. Je n’ai pas le choix. Peut être que ça sera bien en fin de compte ce mariage ? Ce 27 juin 2003 ce n’est pas Antonio qui ouvre les portes de l’église mais Silvio et je me crois dans un rêve. Et pourtant son attitude n’est pas comme dans mes désirs. Non, ses traits sont tirés et son regard perdu. Il va voir directement papa et lui murmure des mots à l’oreille. Papa parle au chef de ses singes volants et je les vois fourmiller dans l’église en faisant sortir tout le monde. On m’emmène sans rien me dire. Par la porte de derrière. Dans une voiture aux vitres teintées. Et l’information tombe. Antonio est mort. Accident de voiture alors qu’il était en route pour la cérémonie.

Je n’arrive pas à être tellement triste mais le choc est bien présent. Le lendemain papa décrète que pour la sécurité de sa seule héritière il fallait me cacher en Sardaigne. « Il n’y a que toi a qui je puisse faire confiance pour ca. Et puis elle te connaît bien. Avec toi elle se sentira en sécurité » j’entends ces mots sortir de la bouche de papa. Silvio et moi partons en exil en Sardaigne dans une des caches de la mafia Gigliotti. Ce sera lui mon seul contact avec le monde extérieur.

Quelle aubaine pour nous. Nous pouvions à présent vivre ensemble. Amoureux sans se cacher. Sans devoir inventer d’excuses. Nous avons mis en scène peu à peu cette histoire d’amour que nous vivions déjà depuis des années. Et papa voit que Silvio me fait du bien. Qu’il est digne de confiance.
En 2005 il fait de Silvio son bras droit. Papa veut le remercier de n’avoir pas placé ses intérêts personnels avant la sécurité de sa fille et de m’avoir protégée. Fin 2005 nous nous marions, scellant cette idylle atypique.

Je me lance dans le commerce de fleurs. Non seulement car j’aime cela mais aussi car cela peut servir de cache d’armes. Spécialité de notre branche de la mafia. Mon carnet d’adresse grandit tout autant que la réputation de Silvio. Mais nous n’y trouvons plus tellement notre compte. Sentimentalement parlant. Après des années de jeu de chat et souris puis de cache cache, le quotidien pépère d’un couple ne nous intéresse peu. Nous décidons d’un pacte. Chacun peut aller voir ailleurs. Mais on doit s’en parler et évidemment le domicile conjugal nous reste réservé. Si je ne suis pas choquée à l’idée de l’imaginer dans les bras d’une autre, pas question de voir un cheveux brun sur MON oreiller ou une trace de rouge à lèvre sur MON bol.

En 2014 nous allons à Galway pour essayer d’y établir une mainmise sur les armes. De quelle manière ? Grâce à mes contact dans le milieu de l’horticulture. Laissant en Italie ma boutique à une personne de confiance en plus de créer le Red Velvet nous nous établissons dans une boutique de fleurs qui est sous toute apparence une affaire honnête. Si vous saviez ...
Voilà six ans révolu que l’on est ici et les choses se portent bien. Malgré l’accord passé avec les russes et la tempête de septembre, nous y trouvons notre compte.

Le seul petit souci à l’horizon pourrait être les « visions » que j’ai depuis quelques mois … souvent. Un peu partout … je vois Antonio. Pourquoi et comment ? Aucune idée. Est ce que je deviens folle. Est ce que ça veut dire quelque chose ? Aucune idée … pour le moment personne n’est au courant. Et j’ai bien l’intention que ça reste ainsi. Ça ne va pas durer. N’est ce pas?